Définition de Portrait :
De l’ancien français portraire, dessiner.
Représentation de quelqu’un par le dessin, la peinture, la photographie, ou autres.
« Au sens général, représentation d’une personne ; mais la définition du portrait comme concept esthétique appelle quelques précisions » (Etienne Souriau, philosophe et esthéticien français du XXème siècle)
Le portrait peut être une émanation du caractère, de la personnalité de l’individu (expressions, jeux de regards, pose, physionomie). Certains écarts face à la réalité peuvent revêtir une valeur expressive, c’est le cas par exemple de la caricature. Le portrait véhicule certains codes sociaux et historiques, il est une interface pour communiquer et se présenter. Il peut aussi être un dépassement de la représentation réaliste vers une expression plus imagée, décalée, symbolique ou abstraite.
Le portrait revêt plusieurs fonctions : perpétuer le souvenir d’une personne, créer une image historique, politique, sociale. Il peut être un symbole de pouvoir en exprimant le prestige de son commanditaire.
Le portrait est en un genre à part entière, au même titre que la nature-morte, la peinture d’histoire ou le paysage. Il s’incarne dans les arts visuels aussi bien en deux dimensions (peinture, photographie, dessin) qu’en 3 dimensions (vidéo 3D, sculpture), mais aussi dans d’autres champs artistiques (par exemple, en littérature).
Histoire du portrait :
Icônes antiques et du présent :
La naissance du portrait remonte à l’Antiquité, au II siècle et III siècle.
L’intérêt premier du portrait est de reproduire les effigies des ancêtres, des hommes politiques ou des divinités et ainsi de leur rendre hommage. Dans la civilisation romaine, le portrait est symbole de prospérité pour les grands dirigeants. Il s’agit d’affirmer son pouvoir à travers des représentations. En Égypte, les portraits du Fayoum ont vocation à représenter et ainsi conserver la mémoire du défunt.
Dans les premières heures de la Chrétienté, les portraits dépeignent les figures de la Bible. Les icônes apparaissant peintes sur des retables ou des panneaux de bois mobiles. Les sujets peints n’expriment pas d’émotion particulière, ils ne cherchent pas à transmettre des sentiments. Ces icônes ont avant tout un sens théologique, elles font l’objet de l’adoration des fidèles. Elles sont peintes de telle manière que la lumière semble venir de deux sources distinctes, celle qui éclaire le sujet de l’extérieur et celle qui émane de l’intérieur même du sujet. Le sujet a le visage entièrement découvert. Le regard est intérieur, il ne fixe rien en particulier autour de lui. L’icône fait abstraction des notions de perspective, de temps et d’espace.
Les peintures d’Yves Chaudouët, peintes sur des panneaux en bois de 40 x 40 cm renvoient à ces icônes. L’artiste aborde ses modèles de face ou de trois-quart, en effaçant les détails jugés iconographiques et en proposant un fond dépouillé. Il peint les visages en cherchant à « leur rendre leurs propres traits ». Il y a là une volonté de redonner à ces visages des propriétés de formes et de volumes à travers le regard de l’autre. Il offre alors à ces portraits une dimension iconique, celle du présent.
« Il faut peindre cette personne qui accepte d’être présente, avec ses volumes qui viennent vers vous et s’en éloignent, avec sa manière unique d’être en couleur avec la lumière, sa présence comme si elle était juste là. »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 88
Les portraits de la Renaissance :
Du Moyen-Âge à la Renaissance, le portrait s’ancre dans la culture occidentale. Son apogée se fait au XV° siècle avec les flamands (Jan Van Eyck), les vénitiens, et les florentins.
Après s’est orienté vers la représentation de figures bibliques, le portrait devient un objet de reconnaissance sociale de la Noblesse, puis de la bourgeoisie.
Dans Essai la peinture, Yves Chaudouët évoque les portraits qui l’on inspiré et en particulier ceux de Raphaël (1483-1520) et de Jacopo da Pontormo (1494-1557)
« Ainsi les paupières de Guidobaldo de Montefeltro, les narines d’Elisabetta Gonzaga, la peau de Francesco Maria della Rovere … dans les détails toujours davantage … écrits chacun par le même Raphaël dans une langue vivante inconnue que pourtant nous comprenons, une parole silencieuse, audible sans effort grâce à sa puissance visible, une attention, qui déjà sans limites (…), est capable de se dépasser encore en créant un langage particulier pour présenter chaque modèle. »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 68
« Le portrait de Maria Salviati par Jacopo da Pontormo me fait l’effet d’un point d’exclamation mis là pour la conclure »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 68
Raphaël est considéré par ses contemporains comme le peintre de l’harmonie et de la grâce. Son œuvre regroupe l’expression du classicisme dans la Haute Renaissance. Sa technique met en avant une précision du trait, des teintes ainsi que des perspectives.
Jacopo de Pontormo, inspiré par les peintres Dürer et Michel-Ange, est considéré comme appartenant au mouvement maniériste. Ses modèles adoptent plutôt des poses contorsionnées avec des visages inquiets.
Au XVIIe et XVIIe siècles :
Au XVIIe siècle, le portrait est progressivement délaissé au profit des scènes de cour et de la peinture d’histoire.
Les portraits peints d’Yves Chaudouët nous renvoient également aux peintures de Nicolas Poussin – à ses théâtres d’objets – et à Francisco de Goya qui disait que dans la peinture, « il n’y a ni dessin, ni couleur, il n’y a que des plans qui avancent et qui reculent ».
Nicolas Poussin est un peintre français (1594-1665) qui porte le classicisme à son apogée. Cherchant à atteindre l’idéal de la perfection antique, inspiration très présente au XVIIe s, il peint en particulier des paysages en construisant les scènes par plan, à partir de reconstitution miniature.
Francisco de Goya est un peintre et graveur espagnol (1746-1828). De son vivant, il fût essentiellement reconnu comme graveur. C’est à partir de 1900 que son talent de portraitiste est apprécié. Son travail inspire le Romantisme et la peinture contemporaine.
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« Portraiturer à la peinture à l’huile m’est une entreprise longue et fastidieuse. Les premiers moments du tableau laissent croire que ce ne sera pas si difficile. Mais l’efficacité séduisante des premières intuitions-au rythme enjoué de la découverte du modèle, couleurs fraîches jetées sur la lumière du fond- se change dès la deuxième séance en parois abruptes, en tout opposées à ma progression. »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 87
» Peindre des portraits me renvoie surtout très directement à la difficulté d’atteindre la peinture elle-même, transpercée par la photographie, le cinématographe, le rétinien et le commentaire, m’approcher de sa folle simplicité, qui conduit toujours vers plus de surprises … »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 89
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Pour en savoir plus sur le Portrait et les peintures d’Yves Chaudouët :
Dossier pédagogique sur le portrait, BNF
Le portrait : pratiques artistiques en arts visuels
Dossier pédagogique, Le portrait au musée des Beaux-Arts de Tours
Essai la peinture, Yves Chaudouët, Actes Sud, 2015
Claire Kueny, « Idoles contemporaines. Les portraits peints d’Yves Chaudouët », nov. 2013
Fayoum
Portrait d’une jeune femme habillée d’un vêtement pourpre, III°siècle
Fayoum
III° siècle
Portrait de Guidobaldo 1er de Montefeltro
Raphaël, Tempera sur bois, 70.5 x 49.9 cm, 1506
Elisabetta Gonzaga
Raphaël, Huile sur toile, 52.5 x 37.3 cm, 1504-1505
Maria Salviati
Pontormo, Huile sur toile, 87 x 71 cm, 1543-1544
Don Manuel Osorio Manrique de Zuniga
Francisco de Goya, Huile sur toile, 110 x 80 cm, 1787
Les Bergers d’Arcadie
Nicolas Poussin, Huile sur toile 101 x 82 cm, 1628-1630
Paysage aux buveurs
Nicolas Poussin, Huile sur toile, 63 x 78 cm, 1637-1638