« Mardi dernier, je suis allée voir l’exposition Spoken Word aÌ€ la Criée. Lorsque je suis rentrée, je me suis retrouvée devant quelque chose de surprenant. Devant moi se tenaient des adolescents, des lycéens vu leur âge. Ils étaient laÌ€, parmi les Å“uvres, sans mouvement et inertes. Que faisaient-ils ? Faisaient-ils partie de l’exposition ? A chacun de mes pas, je découvrais un nouveau point de vue, une nouvelle sensation comme si je traversais un nouveau paysage. Prendre part au paysage, voilaÌ€ ce qui leur était suggéré. – Le sol est devenu une terre aride, l’air est devenu chaud, très chaud -. Le bruit des souffles faisait écho aux bruits du vent. Un aÌ€ un, ils sont devenus sculptures puis rochers, arbres, petites beÌ‚tes, observateurs… J’étais ailleurs, loin de la Criée, laÌ€-bas aÌ€ l’autre bout du monde et le temps était comme étiré, presque arreÌ‚té. » – Anaïs M.

Nous sssommes des

ssserpents de

sssoie,

par deux ou trois,

liés,

pas presssés,

nous sssommes sssilencieux

dans le désert.

 

C’est une chanson parlée qui raconte des histoires. L’histoire, c’est un voyage, une traversée dans le paysage. Elle se passe dans le désert, dans un livre, dans un film, dans la main, dans les sons. Il y a un livre. Les formes sortent du livre : « c’est un caillou, un arbre, une feuille, une courgette, une pomme de terre. »

C’est un film de 7 heures. Nous voyons un plan, puis un autre, entre les deux des écritures défilent, les mots nous donnent aÌ€ imaginer ce qu’on ne voit pas dans l’image. Les sons aussi. Que voit-on quand on entend: plaine creuse, coyotte, cactus ?

C’est le désert californien.

Avec les élèves de TPS-PS de l’école maternelle Volga

 

Née en 1981 à Paris.

Vit à Rennes et travaille partout,

http://feliciaatkinson.com

http://www.shelter-press.com

ddab (documents d’artistes en bretagne)

Félicia Atkinson est l’une des trois artistes associés au cycle « alors que j’écoutais moi aussi… » présenté aÌ€ La Criée en 2017.

Elle commence par étudier l’anthropologie aÌ€ Paris. En 2002, elle participe au projet Bocal de Boris Charmatz qui réunissait une quinzaine d’étudiants de milieux variés autour d’une réflexion sur la formation en danse et son rapport aÌ€ l’art. C’est cette expérience, entre autres, qui a motivé sa volonté d’étudier aux Beaux-Arts de Paris, dont elle est diplômée depuis 2008.

En 2011, elle crée avec l’éditeur Bartolomé Sanson Shelter Press, plateforme qui « fonctionne comme une organisation nomade menée par des artistes qui construisent des dialogues entre art contemporain, poésie et musique expérimentale aÌ€ travers des publications, des expériences pédagogiques et des expositions ».

Elle a reçu en 2013 le Langui Prize Painting aÌ€ l’occasion du Young Belgium art prize, ce qui manifeste son attachement aÌ€ une pratique picturale. Elle s’installe ensuite dans les Alpes où elle obtient une bourse de la fondation nationale des arts graphiques. Aujourd’hui, elle vit entre Rennes et Quimper et enseigne la peinture aÌ€ l’Ecole nationale supérieure d’art de Bretagne, en plus de ses activités de plasticienne et de co-directrice de Shelter Press.

Son travail s’attache selon elle aux « questions d’improvisation, d’indisciplinarité, de fiction, d’assemblage, de bruit, de poétique, d’abstraction, de distorsion des liens entre ready-mades et musique concrète… ». Ses recherches variées lui ont valu d’eÌ‚tre exposée depuis 2006 aÌ€ travers le monde (Copenhague, Bruxelles, Mexico, Paris, Berlin…). En tant que compositrice de musique expérimentale, elle a aussi réalisé de nombreux concerts et enregistré plus d’une dizaine de disques, dont certains sous son propre label (Shelter Press).

« Félicia Atkinson s’interroge […] sur les lieux et déplacements du sonore, mais aussi sur la place du disque, du livre et du texte comme espace d’exposition, posant son regard, son toucher et son ouïe sur les problématiques d’onde, de couleur aÌ€ travers l’installation, la peinture, l’impression, le texte, la sculpture et le son…Une queÌ‚te pour ainsi dire infinie et toujours mouvante,  volontairement éclatée et disparate, qui se développe notamment aÌ€ travers des expéditions régulières en Californie (desert de Mojave, Los Angeles, Big Sur…), en Oregon, en Arizona ou au Nouveau-Mexique. »

Le pêle-mêle est un activateur de rencontre avec les œuvres.

C’est une série d’outils pédagogiques et ludiques conçus spécifiquement pour chacune des expositions.

Le pêle-mêle d’images: ce sont des fragments d’œuvres à chercher dans l’exposition pour aiguiser son regard sur la couleur, les textures, les matières, l’échelle, la distance, la construction, le nombre, la répétition …

Le pêle-mêle d’atelier: ce sont des matériaux et des règles du jeu pour expérimenter les différents gestes plastiques produits par les artistes. Ils font travailler l’esprit et les mains !

Observer, (se) raconter des histoires, jouer, changer d’échelle, de forme, de matière, devenir un rocher, un cactus, (se) déplacer, écouter le silence, bruit et musiques concrètes, chercher des trésors, s’assoir, laisser parler les mains, assembler, rouler, tracer, malaxer, appuyer, effleurer, découper, nouer, lisser, caresser, improviser, regarder à nouveau, respirer, devenir un petit morceau du paysage..

Les cartes « Histoire de l’art »:

Des points communs entre les Å“uvres de l’exposition et d’autres Å“uvres de l’Histoire de l’art peuvent eÌ‚tre observés. Avec ce jeu il s’agit d’associer chaque image aÌ€ une Å“uvre de l’exposition. Par exemple, en concevant L’Oisive (Peter Shire Cover), Félicia Atkinson s’est fortement inspirée de la table basse élaborée par Peter Shire en 1984, ce qu’elle souligne d’ailleurs dans le titre de son Å“uvre.

A udio Book

C’est une pièce sonore de sept heures, présente dans l’exposition Spoken Word. Elle est comme un programme radiophonique qui comporterait des éléments variés qui s’entrechoquent : description Wikipédia de la faune et la flore du désert, poèmes écrits en voyage, captations sonores dans le désert de Mojave et Bretagne, sons électroniques..

B uchla

Buchla est un constructeur américain de matériel audio fondé en 1962 aÌ€ Berkeley en Californie aux États-Unis par l’un des pionnier des synthétiseurs, Donald Buchla. L’entreprise est connue en particulier pour ses synthétiseurs modulaires.

C actus

Cactées ou encore Cactacées (Cactaceae) sont des plantes épineuses qui proviennent des Etats-Unis. Elles forment une famille de plantes aÌ€ fleurs. Ce sont presque toutes des plantes grasses ou succulentes, c’est-aÌ€-dire qui stockent dans leurs tissus des réserves de « suc » pour faire face aux longues périodes de sécheresse.

D ésert

Un désert est une zone très peu propice à la vie, où les précipitations ( la pluie) sont rares, et où par conséquent les conditions de vie sont hostiles pour les plantes ainsi que pour la vie des animaux. Les déserts font partie des environnements extrêmes.

E chelle

Il y a parfois une différence entre la mesure d’un objet réel et sa représentation, on appelle cette différence l’échelle des objets. Dans l’exposition, on peut trouver des objets ou images aÌ€ différentes échelles, cela vient bousculer notre point de vue.

F initude

Quand les choses sont finies, elles ont une limite, un contour. Les œuvres de Félicia sont souvent « in process », elle se déroulent, elles peuvent être « en pose », reprendre ensuite, comme en musique, elles sont activables et ré-activables.

G este

Le geste est un mouvement du corps, soit de la main, des bras, de la tête qui implique une action. En art, il désigne l’intention de l’artiste dans la conception et la création de son œuvre : un geste plastique, musical.

H ybridation

C’est le mélange des caractères de deux choses qui en forme une troisième aÌ€ la fois singulière et reconnaissable.

I mprovisation

C’est le processus par lequel l’artiste crée ou produit une Å“uvre musicale spontanée et/ou imaginaire, en se servant de sa créativité dans l’instant, de son savoir technique et théorique et parfois aussi du hasard.

J oshua tree

Le parc national de Joshua Tree, situé dans le Sud-Est de la Californie, aux États-Unis tient son nom de l’arbre de Josué (Joshua tree en anglais). Il s’agit d’une espèce que l’on rencontre uniquement au Sud-Ouest des États-Unis et que Félicia Atkinson filme dans Secrets.

L à bas

Là-bas est une sculpture-étagère de Félicia Atkinson, dont le titre prend pour possible mais non unique référence le roman du même nom publié par Joris-Karl Huysmans en 1891.

M ojave

Le désert de Mojave est une étendue désertique d’environ 40 000 km² traversant la Californie, le Nevada et l’Arizona, au Sud-Ouest des États-Unis. Ce sont des vues de ce désert que présente le film Secrets.

N oeud

Enlacement ou entrelacement d’un ou plusieurs objets flexibles. En créant Ami(e), Félicia Atkinson réalisa une longue tresse composée d’éléments en soie, coton, laine et feutre noués entre eux.

O isive

L’Oisive (Peter Shire Cover) est le titre d’une Å“uvre présentée. L’oisiveté désigne le fait de ne rien faire, de n’avoir pas d’occupation précise. C’est un état dans lequel Félicia Atkinson souhaite que le visiteur se plonge en s’installant aÌ€ cette table et en perdant son temps aÌ€ jouer avec les petites sculptures posées dessus.

P aysage

Vue d’ensemble que l’on a d’un point donné sur une étendue spatiale naturelle ou transformée par l’homme. Dans le film Secrets, des vues de paysages désertiques sont diffusées. L’exposition, dans son ensemble, évoque aussi un paysage, les formes des sculptures rappelant celles des pierres, des arbres ou des cactus que l’on retrouve dans le désert.

S helter-Press

Shelter Press est une plateforme d’édition et de commissariat d’exposition française fondée en 2011 par l’éditeur Bartolomé Sanson et l’artiste Félicia Atkinson. Shelter Press établit des dialogues entre l’art contemporain, la poésie et la musique expérimentale aÌ€ travers des publications, des expériences pédagogiques et des expositions.

T  emporalité

Mot qui se rapporte aÌ€ l’idée de temps. En réalisant la vidéo Secrets, Félicia Atkinson a accordé une grande importance aÌ€ la durée de son film qui s’étend sur sept heures. Avec cette vidéo aÌ€ la temporalité bien plus longue que la majorité des films, elle travaille ainsi sur la notion de lenteur.

U topie

Construction imaginaire d’une société idéale qui contribuerait au bonheur de chacun. Dans sa vidéo Secrets, Félicia Atkinson filme des sites que l’on pourrait considérer d’utopiques, dont, Biosphère II, un site clos construit entre 1987 et 1991 aÌ€ Oracle, dans le désert de l’Arizona, aux États-Unis. L’objectif de Biosphère II est de reproduire de manière artificielle un système écologique, notamment pour évaluer la faisabilité de biosphères identiques lors de la colonisation spatiale. C’est le plus grand système écologique fermé jamais construit composé d’une foreÌ‚t tropicale humide, d’un océan avec sa barrière de corail, d’une savane, d’un désert, d’un habitat humain avec ses quartiers privés et ses lieux de travail, etc.

V oyage

Déplacement que l’on fait, généralement sur une longue distance, hors de son domicile habituel. Félicia Atkinson s’est beaucoup inspirée de son dernier voyage dans les déserts nord-américains pour concevoir son exposition, et faire voyager aÌ€ leur tour les visiteurs l’explorant.

Autres entrées possibles dans l’abécédaire:

A nimisme

C’est la croyance en un esprit, une force vitale, animant les eÌ‚tres vivants, les objets mais aussi les éléments naturels, comme par exemple: les pierres ou le vent.

B oot-leg

Originellement, cette expression désignait un individu qui cachait de l’alcool dans la partie montante de sa botte. Le terme, très répandu dans le domaine du jeu vidéo, désigne une version illégale ou pirate d’un jeu. Avec L’Oisive (Peter Shire Cover) Félicia fait une version mi « boot-leg » (pirate), mi « cover-song » (reprise) de deux tables du designer de Los Angeles.

D écoupage

C’est l’action de prélever, enlever un morceau d’une surface (papier, bois, carton..), différents outils servent aÌ€ découper (ciseaux, cutter, scies, emporte-pièces…)

D eleuze

Gille Deleuze est un philosophe français, sa pensée a traversé les années 70. Il a formulé beaucoup d’idées -qu’on appelle des concepts-  notamment autour de la peinture et du cinéma et du processus de création.

J eu

La sculpture L’Oisive (Peter Shire Cover), prenant la forme d’une table recouverte de petites sculptures instantanées, incite le visiteur aÌ€ venir s’y assoir afin de les manipuler et de jouer avec.

S poken word

Le spoken word est une façon particulière d’oraliser un texte, qu’il soit poétique ou autre. Félicia Atkinson a appelé son exposition Spoken Word (une chanson parlée), elle qui déclame parfois de courts poèmes dans ses morceaux de musique.

S culpture

Å’uvre d’art réalisée en volume (ronde-bosse) ou en relief (bas ou haut-relief). Félicia Atkinson modèle l’argile pour donner forme aÌ€ de petites sculptures instantanées, prenant place dans L’Oisive (Peter Shire Cover) ou LaÌ€-Bas, et parfois agrandies, donnant naissance aux impressionnantes sculptures Ami(e) et Ici. Dans Spoken Word (une chanson parlée), certaines sculptures telle L’Oisive (Peter Shire Cover), prennent également des formes proches de celles utilisées dans le design d’objet.

(suite…)

Dans le cadre du projet « Territoires Extra » Le grand apprentissage, l’artiste américain David Horvitz, l’artiste rennaise Félicia Atkinson et la commissaire d’exposition Barbara Sirieix ont été invités à partager une résidence dans le village fortifié de Moncontour.
Les élèves de la classe ULIS et les CM1 de l’école primaire publique de Moncontour ont ainsi pu rencontrer Félicia Atkinson et l’écouter parler de son travail, avant de venir découvrir son exposition Spoken Word (une chanson parlée) aÌ€ la Criée. La visite a été l’occasion de se remémorer les paroles de l’artiste et d’expérimenter son processus de travail, en adoptant ses gestes et techniques de création lors d’un atelier de production se déroulant dans l’espace d’exposition.