Archive de novembre 2020

« Vacances Fictions » avec le centre de loisirs Dominique Savio et L’Armada Productions

lundi 30 novembre 2020

Pendant les vacances d’automne, du 26 au 30 octobre 2020, plusieurs groupes d’enfants de 6-12 ans du centre de loisirs Dominique Savio ont participé à un parcours culturel associant La Criée centre d’art contemporain et l’Armada Productions : « Vacances fictions ».

Le mardi matin à la Criée, les enfants ont découvert l’exposition Mime qui réunit les œuvres de Mathis Collins et de son père, Paul Collins. L’attention s’est portée sur les tableaux de Mathis Collins, truffés de personnages de la Commedia dell’arte et du théâtre de rue. Les enfants ont remarqué des Polichinelles, des Pierrots, des marionnettes… mis en scène avec des motifs récurrents qui prêtent à la comédie : des chapeaux bicornes en mouvement, des jeux de cibles et de « passe-boule », des coups de bâtons (slapstick)… Après un temps de présentation, les enfants ont été invités à choisir une œuvre en binôme. L’idée était d’observer minutieusement un tableau et d’imaginer ce qu’il s’y passe. Justine de L’Armada Productions est ensuite passée parmi les duos avec son enregistreur portatif pour garder trace des différents récits et histoires inventées.

Le mercredi après-midi à La Casba, les enfants se sont rendus à Saint-Erblon pour découvrir les locaux de l’association l’Armada Productions. Au programme : raconter la suite des aventures des personnages d’une œuvre de Mathis Collins. Pour ce second atelier, les groupes ont été invités à conter leurs récits dans les studios d’enregistrement de L’Armada, afin de créer une émission de radio. Accompagnés de Justine, ils ont pu ainsi découvrir les coulisses de la création radiophonique. Comment parler dans un micro ? Le casque aux oreilles, tous les bruits sont amplifiés… il s’agit d’être très concentré·e. Pendant ce temps, les autres groupes ont préparé des questions à poser à Amandine pour une interview sur la Criée. Cet après-midi a été riche d’échanges et de rencontres. Toutes les histoires ont pu être enregistrées, pour ensuite être montées par Justine de L’Armada.

À découvrir également dans l’émission Mercredi ! : Mathilde, étudiante en Master Métiers et Art de l’exposition nous raconte d’où vient le conflit qui est au cœur de tous les tableaux gravés par Mathis Collins. Celui-ci opposa La Commedia dell’arte à la comédie française et marqua la naissance des arts forains. Justine, elle, nous dévoile quelques secrets des expressions et mots qui ont traversé l’histoire du théâtre  ! (Une erreur s’est glissée dans l’émission : Paroles, paroles, paroles , l’évènement prévu  le 12/12/2020 à La Criée n’aura pas lieu en présence du public. Il sera filmé et diffusé en vidéo sur le site internet de La Criée.)

Le vendredi après-midi, au centre de loisirs Dominique Savio, les enfants inscrits au parcours, mais aussi d’autres curieux et curieuses de l’univers de Mathis Collins et de ses personnages grotesques et carnavalesques ont organisé une exposition des dessins, collages et peintures qu’ils ont pu réalisé avec Moustapha et Maëva,  animateur et animatrice du centre de loisirs Dominique Savio : chapeaux bicornes, clown, personnages de la commedia dell’arte, masques du carnaval de Venise étaient à l’honneur !

Merci à tous les participant·e·s !

Biographie Mathis Collins

mercredi 11 novembre 2020

Mathis Collins

Né en 1986 à Paris
Vit et travaille à Paris
Représenté par la galerie Crèvecoeur à Paris
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Mathis Collins a réalisé ses études d’art entre Cergy, Metz, Montréal et Bruxelles avant de participer à Open School East à Londres. Sculpteur et performeur franco-canadien, il organise des ateliers collectifs et des manifestations publiques autour d’objets ou de pratiques artisanales populaires et grotesques qui tentent de repenser les modes d’exposition des arts populaires. Les sujets et les matériaux explorés dans son œuvre vont de la récolte du chêne-liège à l’ornementation d’une bouteille d’alcool, du guéridon de café à la chaussure de clown, des bas-reliefs polychromes aux Poulbots de Paris, de la caricature du Second Empire aux méthodologies d’éducation artistique expérimentales contemporaines.

Ses œuvres ont été montrées au Palais de Tokyo, au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, à la Fondation Lafayette Anticipations, Paris, à la Friche Belle de Mai à Marseille, à la Rijksakademie d’Amsterdam, à 1m3 à Lausanne et à Longtang, Zürich.
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MIME

Œuvres exposées

 

Bicornes (stand de tir), 2020
tilleul, teinte à bois, moteur
200 × 360 × 6 cm
Fabrication : ateliers Nathanaël Moix

 

Artiste policier à la fête à neuneu, 2020

Artiste policier en procès, 2020

Artiste policier mime, 2020

Artiste policier surpris par la mort, 2020

Artiste policier contre l’art et l’artisanat, 2020

Artiste policier danseur de corde, 2020

Artiste policier quittant Paris, 2020

Artiste policier et le Guignol’s Band, 2020

Artiste policier contre Poulbot, 2020

Artiste policier cible de toutes les critiques, 2020

Artiste policier hué, 2020

Artiste policier mort de rire, 2020

tilleul, teinte à bois
chaque panneau : 200 × 120 × 3 cm

 

Paul Collins et Mathis Collins, History of Modern Art (for D. R.), 2020

acrylique sur lin, tilleul, teinte à bois
146 × 97 cm

 

Toutes les œuvres de Mathis Collins : courtesy de l’artiste et de la galerie Crèvecœur, Paris.
Production : La Criée centre d’art contemporain, Rennes.

La fête foraine, véritable phénomène social

mardi 10 novembre 2020

L’univers que Mathis Collins déploie pour Mime s’inspire des jeux et de l’esthétique des arts forains. Il est intéressant de revenir plus précisément sur ces références. [1]

  • Bref historique de la fête foraine

Les fêtes foraines trouvent leur origine dans les foires, espaces privilégiés d’échanges qui deviennent au XIXe siècle des lieux festifs de divertissement. La Révolution française insuffle un esprit libre et laïc aux manifestations populaires succédant aux fêtes religieuses, puis la révolution industrielle entraîne des déplacements massifs des populations rurales vers les grandes villes. De ces mouvements d’urbanisation, déracinant des populations locales depuis longtemps établies, résulte la perte de valeurs traditionnelles. Ce vide sera comblé par de nouvelles idées laïques basées sur la modernité. C’est la naissance de la fête foraine, véritable phénomène social.

Produits de la société moderne, ces endroits festifs véhiculent une nouvelle idée du bonheur, en lien avec la notion de progrès qui fleurit au moment de l’ère industrielle entre 1850 et 1900. La fête foraine est comme une échappatoire à la vie qui se fait rude en ville, pour aller vers un univers de liberté et de rêverie, bien souvent d’excès. Ces lieux hors normes connaissent leur apogée à la « Belle époque », période allant de la fin du XIXe siècle au début de la première guerre mondiale.

Après la seconde guerre mondiale, les fêtes foraines connaissent un déclin car les spectacles jusqu’alors nomades se sédentarisent. Désormais, les manèges à sensations sont au cœur des animations. L’invitation au voyage hors du temps d’autrefois s’est transformée en une aventure physique suscitant des sensations extrêmes.

  • Les sens à l’affût dans les attractions

Pionnier.ère.s dans l’invention de la publicité, les forain.e.s utilisent des techniques pour envouter nos sens. Par exemple, l’ouïe est sollicitée par les voix éloquentes, la musique diffusée ou encore par les bruits des stands de tirs, des roues de loterie ; la vue est excitée par les nombreuses affiches, les lumières étourdissantes, les décors aux torsades et volutes hypnotisantes ; l’odorat est quant à lui stimulé par des senteurs propres à ces lieux, les confiseries telles que les barbes à papa, guimauves et autres pommes d’amour.

Les arts forains, considérés comme un art populaire, sont perméables à tous les courants. Ils se nourrissent à la fois de l’universel et des traditions locales, pourvu que le résultat soit extravagant, excessif et flamboyant, parfois nostalgique. La sculpture, centrale dans les décors, est caractéristique de la surcharge de l’art forain. Toujours figuratives, se jouant de nos sens avec des trompes l’œil, ces sculptures polychromes sont réalisées sur du bois tendre comme le tilleul ou le sapin. On retrouve de nombreuses références à ces éléments dans le travail de Mathis Collins, notamment dans sa technique de sculpture sur tilleul, dans ses compositions denses ainsi que par son style figuratif caricatural – que l’on pourrait rapprocher de l’art brut. À propos des jeux forains auxquels l’artiste fait référence on peut citer cette idée : « Au même titre que les cibles, les massacres sont très proches de l’art brut[2] ». Les cibles de tir et les jeux de massacre désignent des attractions présentes dans les fêtes foraines.

  • Les arts forains dans le travail de Mathis Collins

L’univers de Mathis Collins emprunte aux arts forains ces deux types de jeux, ainsi que les théâtres de marionnettes. Dans les fêtes foraines, de nombreux stands permettent au public de tenter sa chance en se défoulant et en exerçant son adresse sur des jeux de cibles. Dans Mime, des cibles sont présentes sur toutes les œuvres de Mathis Collins, notamment dans Bicornes (stand de tirs) (2020) qui reproduit le fonctionnement de cibles mécaniques[3]. Mime convoque également l’univers des théâtres de marionnettes[4]. Outre ces éléments, Mathis Collins fait référence aux jeux de massacre. Le but varie selon chaque jeu. Par exemple dans le passe-boule[5], il s’agit de jeter des balles dans la bouche de personnages caricaturés. L’artiste fait référence à ces jeux dans Artiste policier mime (2020) et dans l’œuvre qu’il réalise avec son père, History of Modern Art (for D. R.) (2020).

Mathis Collins organise des ateliers collectifs et des manifestations publiques autour de pratiques artisanales populaires. De ces moments collectifs naissent des créations qui contribuent à renouveler les arts populaires. Par exemple, en 2018-2019 l’artiste est invité par Lafayette Anticipations pour imaginer des ateliers autour de l’histoire des arts forains. À l’issu de ce travail collectif, deux stands de tirs ont été créés et ouverts au public, le Clash-Boule et le Passe-Boule des Maboules.

© Musée des arts forains des pavillons de Bercy

© Lafayette Anticipations

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[1] Cet article s’appuie sur le site du Musée des arts forains des pavillons de Bercy, qui propose une présentation développée des arts forains : http://arts-forains.com/notre-histoire/histoire-de-la-fete-foraine

[2] Site internet du musée des arts forains, pavillons de Bercy, http://arts-forains.com/notre-histoire/histoire-de-la-fete-foraine.

[3] Voir l’article sur le blog Correspondances : « Le bicorne et la cocarde ».

[4] Voir l’article sur le blog Correspondances : « Théâtre de marionnettes et Guignol ».

[5] Voir l’article sur le blog Correspondances : « Le bicorne et la cocarde ».

Francisque Poulbot et les poulbots

mardi 10 novembre 2020

L’une des œuvres de Mathis Collins est titrée Artiste policier contre Poulbot (2020). Qui est Poulbot ?

  • Francisque Poulbot et la pauvreté à Montmartre

Francisque Poulbot (1879-1946) est un dessinateur, affichiste et illustrateur français du début du XXe siècle. Il s’est rendu célèbre par ses nombreuses représentations des enfants de la butte Montmartre. Durant sa jeunesse, Francisque Poulbot fréquente le « maquis » de Montmartre, bidonville parisien où il côtoie la misère des enfants démuni.e.s. En s’intéressant à la pauvreté qui existe dans ces rues parisiennes, Poulbot adopte une posture avant-gardiste pour l’époque. Installé à Montmartre avec sa femme Léona en 1901, ses dessins sont publiés dans la presse dès 1900. Ses créations paraissent dans des journaux humoristiques, sur des affiches, dans des publicités, etc. Attaché à la vie montmartroise, il s’associe à la création de la « République de Montmartre », association d’entraide, en 1920-1921. En 1923, il ouvre Les P’tits Poulbots, un dispensaire rue Lepic qui vient en aide aux enfants nécessiteux de Montmartre. Transformé en association en 1939, cet endroit existe encore aujourd’hui.

  • De Poulbot à poulbot

Mettant en scène des enfants pauvres des rues parisiennes, les productions de Francisque Poulbot deviennent très populaires. Durant la première guerre mondiale, il dessine deux personnages qui deviendront un célèbre couple de poupées : Nénette et Rintintin. Garçons ou fillettes, les personnages qu’il dépeint sont en haillons, l’air rieur, cherchant à s’amuser, mais toujours débrouillard.e.s. Ainsi et par extension, un « poulbot » désigne un gamin de Paris, un titi parisien. Gavroche, célèbre personnage des Misérables de Victor Hugo (1862), deviendra aussi un terme pour désigner un gamin de Paris.

  • La représentation des « poulbots »

Dans les années 1960 à 1980, le terme « poulbot » est largement associé aux illustrations des enfants parisiens pauvres, possédant une large tête sur laquelle se dessine de grands yeux bleus. Cette représentation ne correspond pas à celle de son créateur originel, il s’agit de celle de Stanislas Pozar, artiste connu sous le pseudonyme de Michel Thomas (1937-2014). La célébrité de ces titis parisiens aux grands yeux est telle que les marchand.e.s de ces dessins fleurissent dans les quartiers de Paris. Ces « poulbots » sont devenus un véritable symbole de Montmartre. Dans son œuvre Artiste policier contre Poulbot, Mathis Collins fait référence au nom propre donc à l’artiste Francisque Poulbot. Toutefois, dans cette œuvre les grands yeux scintillants du guignol évoquent l’imagerie populaire des « poulbots » de Montmartre.

Pour voir des images de poulbots, rendez-vous ici.

À pieds d’œuvres

jeudi 5 novembre 2020

Pour aller plus loin dans l’exploration de l’exposition Mime de Mathis Colins et Paul Colins, retrouvez le dossier pédagogique À pieds d’œuvres, rédigé par Fabrice Anzemberg et Yannick Louis, respectivement professeur d’arts plastiques et professeur d’histoire et géographie, tous deux conseillers relais de la DAAC (Délégation académique à l’éducation artistique et à l’action culturelle) pour le musée des beaux-arts et La Criée centre d’art contemporain.

Le dossier pédagogique est accessible en cliquant sur le lien suivant :

À pieds d’œuvres – Mime

Visuel : Portrait de ma nourrice, François Narcisse Chaillou, v.1882, huile sur toile, 70×54 cm, musée des beaux-arts de Rennes.