Archive de octobre 2020

Théâtre de marionnettes et Guignol

vendredi 2 octobre 2020

Contourner la censure royale, faire parler des marionnettes

Pour son exposition Mime, Mathis Collins s’est intéressé à la naissance des arts forains et à l’histoire du théâtre de rue, dont le théâtre de marionnettes fait partie. Les Å“uvres Artiste policier quittant Paris, Artiste policier et le Guignol’s Band et Artiste policier contre Poulbot (2020) font tout particulièrement écho à ce genre théâtral populaire.

  • Le théâtre de marionnettes

C’est notamment suite à la censure décrétée par Louis XIV en 1680 que cette forme de théâtre va se développer. Les troupes de théâtre de rue n’ont plus le droit de dialoguer en français sur scène ; le monopole est confié à la Comédie-Française. C’est ainsi que le théâtre de marionnettes apparaît comme un moyen de contourner cet interdit et de continuer à jouer. Afin de maintenir leur identité secrète, les comédien.ne.s vont actionner à la main ces figurines, à fils, à gaine ou à tige, sans montrer leur visage. Les marionnettes représentent des figures humaines ou animales et portent la voix des acteur.trice.s qui n’ont plus le droit de s’exprimer ouvertement. Théâtre du registre comique, les marionnettes sont le reflet grotesque de personnages connus, tels que des Seigneurs, des évêques, etc. Le spectacle se déroule souvent dans un castelet, élément de décor de théâtre miniature qui permet au.à la comédien.ne de se cacher. Cette structure a également l’avantage d’être mobile : les acteur.trice.s peuvent déguerpir sitôt le signal donné, castelet sous le bras et marionnettes en main. On retrouve cette image dans l’Å“uvre de Mathis Collins, Artiste policier quittant Paris (2020).

Au XVIIe et dans la première moitié du XVIIIe siècle, des spectacles de marionnettes sont joués à Paris, dans les foires annuelles de Saint-Germain et de Saint-Laurent. Un marionnettiste connu, Pierre Datelin, dit Jean Brioché, importe en France le personnage de Polichinelle et présente ses spectacles sur le pont Neuf. Parmi les pièces jouées, on retrouve des parodies d’opéras où des marionnettes en costumes miment l’action, tandis que des chanteurs, soutenus par quelques instruments, parodient les livrets sur des refrains populaires, alternant allusions grivoises, jeux de mots et humour décalé.

  • La marionnette Guignol

Au XIXe siècle le théâtre de marionnettes connaît un nouveau succès en France grâce au personnage Guignol. Créée à Lyon vers 1808 par Laurent Mourguet, cette marionnette à gaine est inspirée des personnages stéréotypés de la commedia dell’arte, tel que Polichinelle par exemple. À l’image de ce personnage du répertoire italien, Guignol permet à Mathis Collins d’évoquer son double personnage d’ « artiste policier ». À la fois naïf et malin, Guignol est avant tout caractérisé par l’ironie et l’humour, pour lequels les fameux coups de bâton – slapstick – sont une figure récurrente. L’Å“uvre Artiste policier et le Guignol’s Band (2020) met en scène ce genre de farces. Par métonymie, Guignol désigne plus largement le théâtre comique dont il est le personnage principal, avec Gnafron et Madelon. Si le rire est central dans les pièces de Guignol, la portée de son propos n’en est pas moins politique. Figures au parler populaire, les situations jouées s’inspirent souvent de l’actualité et dénoncent des injustices sociales.

Abécédaire Mime

jeudi 1 octobre 2020

Abécédaire Mime, Mathis et Paul Collins

A lfred E. Neuman est l’icône archétype de Mad Magazine. C’est un garçon aux cheveux mal peignés au sourire constant, à qui il manque une dent et qui demande : « What, me worry ? », soit « Qu’est-ce que j’en ai à faire ? » Il apparaît sur les couvertures du magazine, dans des situations comiques où il  incarne des personnages moqués (déguisements, transformations). Il garde toujours la même expression d’un sourire figé, béat. Alfred E. Neuman peut nous faire penser aux personnages de Mathis Collins, tout particulièrement dans l’Å“uvre Artiste policier à la fête à neuneu (2020).

B ateleur : artiste forain.e qui fait des tours de passe-passe, monte sur des tréteaux sur la place publique pour pratiquer un numéro. Au sens figuré, c’est une personne qui fait le bouffon en société.

B icorne : chapeau à deux pointes, d’abord porté par les membres de l’armée française durant la révolution, a fait partie de l’uniforme des officiers dans de nombreux pays puis fut ensuite un couvre-chef masculin standard du XVIIIe siècle. De nos jours, en France, il désigne le couvre-chef des membres de l’Académie française, mais aussi celui des élèves de l’École polytechnique.

B urlesque :  burlesque vient de l’italien burlesco, venant de burla, « farce, plaisanterie » . Cet adjectif qualifie un caractère comique extravagant et déroutant. « Burlesque » se dit aujourd’hui couramment pour désigner un comique qui repose sur un décalage entre la tonalité et le sujet traité.

C astelet : élément de décor de théâtre de marionnettes servant de cadre à l’espace scénique.

C ocarde : insigne souvent rond, de couleurs variées, indiquant un grade, l’appartenance à une nation, une armée ou un parti. Élément souvent porté à la coiffure de militaires ou de hauts fonctionnaires. En France, ce sera l’insigne porté par les partisan.e.s de la Révolution puis par la population entière en signe de ralliement (cocarde nationale, patriotique).

C omédie-Française : institution culturelle française fondée en 1680 sous l’ordre de Louis XIV pour faire face aux comédien.ne.s italien.ne.s. Il s’agit du seul théâtre d’État composé d’une troupe de comédien.ne.s permanent.e.s.

C ommedia dell’arte : genre de théâtre populaire italien né au XVIe siècle caractérisé par des personnages comme Pierrot, Arlequin, Polichinelle, etc. Les acteur.trice.s improvisent selon le caractère du personnage et jouent sur les ressorts de la ruse, de la naïveté, de la caricature. Leur travail réside principalement dans un jeu corporel et de gestes, il.elle.s ont généralement des masques et costumes.

F arce : genre théâtral né au Moyen-Âge, qui a pour but de faire rire et qui a souvent des caractéristiques grossières. Son origine remonte à l’Antiquité gréco-romaine. Par extension, la farce désigne l’acte de se moquer.

F oire : manifestation commerciale, attractive se tenant dans une ville ou un village, à un endroit souvent fixe situé en plein air. Une fête foraine est une forme de foire, où des forain.e.s itinérant.e.s se rassemblent et proposent des attractions, jeux de tirs, manèges, etc.

F orain, ce qui est relatif aux foires. Désigne également une personne qui exerce son activité sur les foires, les marchés.

G ouge : outil du.de la sculpteur.trice destiné à tailler ou graver dans du bois ou de la pierre tendre.

G uignol est une marionnette à gaine française créée à Lyon vers 1808 par Laurent Mourguet. Le terme désigne également par métonymie le théâtre de marionnettes comique dont Guignol est le personnage principal, formant avec Gnafron et Madelon le trio récurrent des pièces du répertoire classique.

J eu de massacre : type de jeu que l’on retrouve dans les foires. Il s’agit d’un jeu d’adresse où l’on doit viser bien souvent des caricatures de figures connues de tous.tes, telles que des policiers, belles-mères, clowns, guignols, etc. Ces personnages sont représentés avec des têtes grimaçantes – ce qui peut nous faire penser aux masques de la commedia dell’arte. Ils sont généralement sculptés dans des planches en bois de sapin ou de tilleul, puis peints.

M ad Magazine  est un magazine satirique américain créé en 1952. Sous une apparence de magazine jeunesse, Mad caricature et se moque aussi bien de la culture populaire américaine que des sujets politiques contemporains.

M arionnette : figurine représentant un être humain ou un animal, actionnée à la main par une personne cachée. Il y a des marionnettes à fils, à tige, à gaine.

M arotte : désigne tout d’abord le sceptre de la folie, surmonté d’une tête grotesque coiffée d’un capuchon bigarré de différentes couleurs et garnie de grelots. On nomme ainsi par extension les marionnettes dont la tête est fixée sur un bout de bois.

M atraque : arme traditionnelle des policiers, c’est un bâton généralement moins long qu’un bras, fait de bois, de caoutchouc, de métal ou de plastique.

M ime, du latin mimus « acteur de bas étage », « farce de théâtre », et  du grec μῖμος « acteur bouffon », « sorte de comédie». Le mime est employé lors d’un spectacle narratif sans parole, échappant ainsi aux censures liées à l’usage de la parole sur scène au XVIIe siècle.

Neu neu (la fête à)  : la Fête de Neuilly- sur-Seine, baptisée également Fête à Neu-Neu, est une fête foraine très populaire par un décret impérial de Napoléon Ier en date du 10 juin .

P alimpseste : du grec ancien palímpsêstos, « gratté de nouveau », manuscrit constitué d’un parchemin déjà utilisé, dont on a fait disparaître les inscriptions pour pouvoir y écrire de nouveau.

P alissade : ouvrage fait avec des bois refendus liés les uns contre les autres, et qui constitue une séparation ou un rempart.

P asse-boule : jeu sous forme de panneau de bois, sur lequel est peint ou sculpté un personnage avec une bouche démesurément ouverte, destinée à recevoir les boules que lance un.e joueur.se.

P hotogravure : ensemble des techniques permettant d’obtenir, à partir de la photographie et par des moyens mécaniques ou électroniques, des planches gravées (clichés) destinées à l’impression typographique.

P hylacteres : un phylactère est, à partir de l’art chrétien médiéval, un moyen graphique semblable à une petite banderole, sur laquelle se déploient les paroles prononcées par le personnage dépeint. Par extension, ce sont les bulles des bandes dessinées qui attribuent des paroles ou des pensées aux personnages.

P ierrot, en italien « Pedrolino », personnage de la commedia dell’arte. C’est un jeune valet rêveur et poétique. Son costume comprend une veste blanche à gros boutons sur le devant – souvent noirs ou blancs – une fraise, et un chapeau avec un flot de rubans. Cette figure est jouée sans masque, le visage enfariné. « Pedrolino » deviendra le personnage de référence dans les pantomimes françaises.

P olichinelle : en italien « Pulcinella », personnage de la commedia dell’arte. Il représente souvent un valet d’origine paysanne, rusé, grossier, disgracieux et spirituel. Vêtu de blanc, il est caractérisé par son masque avec un nez en bec de corbeau, sa bosse, son gros ventre et son imitation du cri des oiseaux. Le personnage de Polichinelle se développe au-delà de la commedia dell’arte et deviendra un protagoniste des théâtres de marionnettes.

P oulbot : mot dérivé du nom du dessinateur français Francisque Poulbot (1879-1946). Affichiste du début du XXe siècle, il représentait de manière humoristique les enfants des rues de Paris, en particulier de Montmartre. Ce terme désigne par extension les « gamins » de Paris.

S lapstick : terme anglais qui signifie  « bâton claqueur » en français. C’est un genre d’humour impliquant une part de violence physique volontairement exagérée.  Ce bâton est inoffensif mais très sonore et renforce l’effet des coups portés,  il est inspiré du « battocchio » des bateleurs italiens.

T einte à bois : produit visant à colorer plus ou moins densément le bois.

T ypographie : désigne les différents procédés de composition et d’impression utilisant des caractères et des formes en relief.

U nivers : police d’écriture dessinée en 1957 par Adrian Frutiger à destination des premières machines à écrire de la marque IBM.

V ernaculaire : qualifie ce qui est propre à un pays, à une population, ce qui a trait au local.