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Pêle-mêle d’impressions

mardi 4 décembre 2018

Les visites « pêle-mêle » sont accompagnées d’un atelier découverte, comprenant la manipulation d’un outil pédagogique et ludique conçu à partir de l’exposition, composé de mots, d’objets, d’image à manipuler en dialogue avec les œuvres. La visite favorise les échanges et permet aux élèves de découvrir la démarche de création des artistes, observer et s’exprimer.

« Si vous deviez garder un seul mot qui exprime ou décrive vos impressions relatives à l’installation vidéo Siham et Hafida, quel serait-il? » :

Voici un pêle-mêle de réponses à écouter ici !

 

L’Abécédaire de Siham et Hafida

vendredi 9 novembre 2018

 

A ïta :  littéralement  « le cri », « l’appel »,  c’est un chant de révolte, personnel ou politique, particulièrement transgressif. C’est un répertoire de chansons et de poésies chantées qui se transmettent à l’oral.

B endir :  instrument à percussion répandu en Afrique du Nord (plus particulièrement au Maghreb), et notamment dans la musique berbère. C’est un tambour sur cadre d’un diamètre d’environ 40cm, recouvert de peau de chèvre.

C hikha :  Une femme musicienne qui pratique l’art de l’Aïta, dans le film de Meriem Bennani, Siham et Hafida sont toutes deux chanteuses. Elles ont pour but de faire perdurer cette tradition. Le mot « Chikka » désigne aussi une danseuse. dans son usage courant, il est parfois péjoratif.

D arija : dialecte utilisé pour chanter l’aïta dont il n’y a pas de trace écrite, il est « spontané et viscéral » selon Meriem Benanni.

D erbouka : instrument de percussion faisant partie des membranophones. Selon ses variantes, c’est un vase étranglé en son milieu et recouvert à l’une de ses extrémités d’une membrane, répandu dans toute l’Afrique du Nord, dans le Moyen-Orient et les Balkans.

D jelaba : longue robe ample avec capuchon portée traditionnellement en Afrique du Nord-Ouest. À l’origine appelé takabout en berbère, tandis que l’appellation djellaba est issue de l’arabe « jilbab ».

D jinns : créatures surnaturelles, issues de croyances traditionnelles au moyen-orient et en Afrique. Ils sont en général invisibles, et peuvent prendre différentes formes (végétale, animale ou anthropomorphe).

Emojis : petite image utilisée dans un message électronique pour exprimer une émotion, représenter un personnage, une action. Le crabe et le papillon se retrouvent animés dans l’installation vidéo, chacun, illustrant un personnage.

F qih : femme sorcière ou marabout qui communique avec les Djinns.

F iltre : Consiste à appliquer une transformation numérique à une partie de l’image ou sa totalité, généralement dans le but de l’embellir.

G énération: Espace de temps d’une trentaine d’années qui sépare un ensemble d’individu.

H açba : Aïta spéciale de Sabi située dans le sud du Maroc, qui a pour seul objet l’expression la tristesse.

I nstagram : réseau social mondial de partage de photo appartenant à Facebook, qui est lui-même un réseau social.

J noun : ce terme désigne le mauvais esprit, le démon dans un langage courant, ici Jnoun est le nom d’une marque de vêtement réalisée par Meriem Bennani et sa soeur. Elle utilise des impressions digitales de motifs qui représentent les paysages du Maroc.

K aftan :  artisanat local des villes impériales du Maroc possédant chacune sa propre tradition du kaftan et mêlant des influences diverses, perse, andalouse… À l’époque, tenue portée par les hommes et les femmes riches de la bourgeoisie marocaine puis un vêtement féminin porté lors de cérémonies (mariages, baptême…). Une tradition veut  que les mariées marocaines changent de caftan sept fois durant leur soirée de mariage.

K ohl : poudre noire ou grise utilisée pour maquiller ou soigner les yeux. Autrefois composée principalement d’un mélange de plomb sous forme de galène, de soufre et de gras animal, voire de bois brûlé ou de bitume. Utilisé par les égyptiens, les arabes, les berbères il protégeait des réfractions du soleil avant d’être un attribut esthétique.

K amanja : instrument à corde frottée.

L ibération: acte de délivrance, l’Aïta permet au peuple d’exprimer son désir de liberté.

M oussems : lieux publics mixtes comme les pèlerinages, les mariages, les fêtes régionales ou officielles où l’on chante l’Aïta.

O ud: instrument à cordes frottées, comme un luth au manche court. Il a en commun avec le luth, le nombre de cordes et la forme de l’instrument, mais il n’a pas de frettes.

Q anun : instrument à cordes pincées, d’origine iranienne

R obs u zit : littéralement « le pain et l’huile »

S auvegarde: préservation de quelqu’un ou de quelque chose. La vidéo de Meriem Bennani s’inscrit dans la volonté de transmettre ce qu’est la Aïta.

T arija : petite percussion digitale en forme de sablier recouvert d’une peau en intestin de chèvre dont la casse est une poterie vernissée, d’un diamètre de 15 centimètres. Instrument privilégié de plusieurs confréries soufies dans la musique traditionnelle marocaine, elle produit un son unique. (à Essaouira, lors de la fête des 10 jours, chaque homme, femme et enfant possède une tarija. A la fin d’une longue procession clôturant cette fête, chaque instrument est jeté dans le feu !)

Atelier et mise en situation avec les Master MEEF

vendredi 9 novembre 2018

Dans le cadre de leur formation, les étudiants en Master MEEF Arts Plastiques de l’ESPE de Rennes sont venus en visite à la Criée afin de découvrir le centre d’art, ses missions et ses ressources en médiation culturelle.

Dans un premier temps, les étudiants ont bénéficié d’une présentation générale de la Criée leur permettant d’appréhender les multiples possibilités de collaboration avec un centre d’art. La biennale des Ateliers de Rennes a été abordée en introduction à la découverte de l’installation Siham & Hafida de Meriem Bennani. Par la suite, ils ont procédé à une libre déambulation au sein de l’installation vidéo  avant de se répartir en trois groupe. Les étudiants ont reçu la consigne suivante : « à partir des ressources mises à disposition, imaginer soit la préparation d’une visite en classe, soit son déroulé avec l’outil Marginalia, ou enfin un atelier en prolongement de la visite. En conclusion, chacun des groupes a présenté ses pistes de travail et réflexion.

 

 

 

Parcours – Passeurs de Culture

vendredi 9 novembre 2018

Parcours – Passeur de Culture

Successivement aux formations « Passeurs de culture » auprès des professionnels du champ social, la Criée s’est associée au FRAC Bretagne, au Musée des Beaux-arts de Rennes et aux Ateliers de Rennes, pour proposer un « parcours découverte » réunissant un large public autour de la biennale A cris ouverts. Pour cette première visite, la Criée a accueilli un groupe de personnes venues d’horizons très variés mêlant les intérêts de chacun. Les discussions portées autour de l’œuvre de Meriem Bennani ont abordé  des champs tels que l’esthétique, l’entrée « sociétale » dont la place des femmes en France et au Maroc, les questions de la transmission ainsi que les points de vue et les identités multiples et fragmentées.  À la suite d’une présentation de la Criée et de la biennale, les participant.es ont été invité.e.s  à  révéler des mots et des impressions par voie orale ou écrite que leur avait évoquée l’installation multimédia. Ils ont également collecté, des objets, matériaux ou autres, mis à disposition, en lien avec l’œuvre afin de réaliser des photos de mises en scène autour des outils Marginalia, en s’emparant notamment des filtres pour réaliser des photographies. Dans la continuité de l’expression et de la transmission, certains ont réalisé des dessins, collages et story-board, tandis que d’autres sont repartis avec des objets, des photographies ou des textes écrits sur des papiers colorés.

 

Bibliographie Siham & Hafida

mercredi 10 octobre 2018

Autour du Maroc

Musiques du Maroc, Ahmed Aydoun, éditions Eddif Artganier, 2001

Maroc, Histoire. Société. Culture., Ignace DALLE, éditions La Découverte, 2001

Histoire inattendue du Maroc, Mouna Hachim, Erick Bonnier, éditions encre d’Orient, 2018

Leila, Reda et Anissa vivent au Maroc, Claire Veillères,éditions La Martinière jeunesse, 2009

Contes et légendes du Maroc, Najima Thay Thay, collection Aux origines du monde, éditions Flies France, 2016

 

Autour de À Cris Ouverts, Les Ateliers de Rennes – biennale d’art contemporain-

La Cohée du lamentin, Édouard Glissant, Gallimard, 2005

Wildness, Jack Halberstam, et Tavia Nyong’o, editions Michael Hardt and Duke university Press, 2018

Identités et cultures, politiques des cultural studies, Stuart Hall, éditions Amsterdam, 2007

 

Autour de l’art vidéo

Art vidéo, Sylvia Martin, éditions Tashen, 2006

Qu’est -ce que l’art vidéo aujourd’hui ? Beaux arts éditions, 2008

Installation II, l’empire des sens, éditions Thames & Hudson, 2003

 

L’art de l’Aïta

mercredi 19 septembre 2018

L’Aïta est un art poétique et musical ancestral pratiqué dans les régions de Abda, Chaouia et Doukkala, c’est-à-dire dans l’axe Casablanca – Safi au Maroc. Le chant mêle des apports berbère, arabe, parler andalou, à la préciosité de la darija. Ode à la mémoire, aux joies et plaisirs de la vie, aux souffrances et espoirs du quotidien, l’Aïta fait l’objet aujourd’hui d’une tentative de sauvegarde et d’archivage, menée notamment par le poète Hassan Nejmi (auteur de Étude de la poésie orale et de la musique traditionnelle à partir de Aïta) qui a conduit Meriem Bennani à la rencontre de Siham et Hafida.

LE MIROIR D’UNE SOCIÉTÉ

«…Nommée aïta (cri ou appel), cette musique, s’affichant sous des formes variées et surprenant par sa liberté de ton, a émergé à la fin du XIXe siècle dans les régions agricoles du Maroc. L’Aïta cristallise les sentiments amoureux et personnalise les souffrances et espoirs du peuple à travers le chant. Véritable source historique et sociologique, elle renvoie à une critique affinée de la société, à travers une intensification quasi-tragique des sentiments populaires. L’art de l’Aïta est d’autant plus remarquable quand il s’instaure porte-parole du peuple qui s’exprime. Principalement le fait d’artistes femmes, l’Aïta suscite un renouveau d’intérêt au XXIe siècle. Une nouvelle génération, représentée par des artistes comme Ouled El Bouâzaoui, Khadija Margoum ou Oueld M’Barek, a repris le flambeau et conserve l’authenticité de cet art… ».

UNE AFFAIRE DE FEMMES

« …Malgré sa dimension féminine, l’aïta s’est caractérisée un certain temps par l’absence de femmes sur scène. Parmi les grandes dames qui ont su réconcilier les citadins avec leurs racines paysannes ou montagnardes, on peut citer la regrettée Fatna Bent l’Houcine. Mais l’expansion de l’art de l’Aïta dans les villes émergentes a eu lieu dans les années 1950 grâce à d’éminents artistes tel que le jovial violoniste Maréchal Mohamed Kibbou et Bouchaïb El Bidaoui. La dimension orale en est une composante fondamentale. Elle est incarnée par la profonde voix des « cheikhates », porte-paroles de leur communauté ».

UNE TRANSCIPTION ORALE DE LA MÉMOIRE

L’art de Aïta veut dire, selon son acception traditionnelle, l’Appel, c’est-à-dire l’Appel de la tribu et le retour aux ancêtres pour semer la volonté dans le cœur des hommes et inviter la Muse de la poésie et de la chanson.

L’Aïta a rythmé la vie des populations rurales au grès des célébrations, des fêtes et des moussems. Mais pas seulement, car l’Aïta, qui est à la fois cri d’amour, d’espérance et appel au dépassement de soi, a revêtu, à une certaine époque de l’histoire du Maroc, un caractère revendicatif d’opposition et de résistance. À cet égard, la figure légendaire et mythique de cheikha Kherboucha illustre à merveille, par ses chants et paroles, le côté contestataire et farouche de ce genre musical. C’est dans la région de Safi, que cette chikha exceptionnelle, se lèvera, avec une force et une rage que rien n’arrête, contre l’injustice. Elle s’opposera par son chant au caïd Aïssa Ben Omar, âme tyrannique, inféodé au pouvoir des colonisateurs français. Il finira par la réduire au silence par un acte sauvage qui fera d’elle un mythe. Hamid Zoughi en a fait un film, « Kharboucha ou rien n’est éternel ».

Extraits de l’Anthologie de l’Aïta parue en 2018. Composée de deux livrets de présentation, en français et en arabe, et de dix CDs enregistrés par quelque 250 artistes et musiciens, dont une trentaine d’interprètes, au Studio Hiba à Casablanca, cette anthologie rassemble les sept types ou couleurs de l’aïta qui diffèrent selon les régions : Hasbaouia, Mersaouia, Jeblia, Zaâria, Chaïdmia, Haouzia et Filalia (ou Beldia). « Cet hommage est une contribution à la réhabilitation de l’art de l’Aïta en tant que patrimoine fragile. On y consigne les genres majeurs, les figures emblématiques, les thèmes abordés, la relation des artistes à leur environnement, la place de la femme et le rôle social de l’Aïta… »