Archive de avril 2015

Bibliographie La Table Gronde

mercredi 1 avril 2015

Essai la peinture
Auteur : Yves Chaudoüet
Édition Actes Sud Littérature
Janvier 2015

Yves Chaudouët, monographie
Auteur : Yves Chaudouët
Édition Actes Sud Beaux-Arts Hors Collection
Mars 2010

 

COFFRET YVES CHAUDOUËT

Film
Auteur : Yves Chaudoüet
Édition Actes Sud Beaux-Arts
Juillet 2003

 

Où allons-nous ? Et que faisons-nous ?
Auteur : John Cage
Traducteur : Yves Chaudouët
Édition Actes Sud / FRAC Champagne Ardenne
Juillet 2003

 

Inaliénable
Auteur : Yves Chaudouët
Édition Actes Sud / CIAV
Novembre 2006


 

Conférence Concertante
Auteur : Yves Chaudouët
Édition Actes Sud
Mars 2008


 

Dans le jardin avec François
Auteur : Yves Chaudouët
Édition Actes Sud
Mars 2008

 

Éperons
Les styles de Nietzsche

Auteur : Jacques Nerrida
Édition Flammarion
2010


L’avenir d’une illusion
Auteur : Sigmund Freud
Édition : Quadrige
1995

 

 

Le déserteur
Auteur : Jean Giono
Édition : Gallimard
2008

 

Manet
Le portait de la vie

Auteur : Marie-Anne Stevens
Édition : Fonds Mercator,
Royal academy of arts
2013


Le regard du portrait
Auteur : Jean-Luc Nancy
Édition Galilée
2000

 

Par-delà le bien et le mal
Auteur : Nietzsche
Édition : le livre de poche
2013

 

 

Le brigand
Auteur : Robert Walser
Édition Gallimard
2014

 

Jim Curious
Voyage au cœur de l’océan

Auteur : Matthias Picard
Édition 2024
2012

Le portrait, littérature et poésie.

mercredi 1 avril 2015

POUR FAIRE LE PORTRAIT D’UN OISEAU

Peindre d’abord une cage
avec une porte ouverte
peindre ensuite
quelque chose de joli
quelque chose de simple
quelque chose de beau
quelque chose d’utile
pour l’oiseau
placer ensuite la toile contre un arbre
dans un jardin
dans un bois
ou dans une forêt
se cacher derrière l’arbre
sans rien dire
sans bouger…
Parfois l’oiseau arrive vite
mais il peut aussi bien mettre de longues années
avant de se décider
Ne pas se décourager
attendre
attendre s’il le faut pendant des années
la vitesse ou la lenteur de l’arrivée de l’oiseau
n’ayant aucun rapport
avec la réussite du tableau
Quand l’oiseau arrive
s’il arrive
observer le plus profond silence
attendre que l’oiseau entre dans la cage
et quand il est entré
fermer doucement la porte avec le pinceau
puis
effacer un à un tous les barreaux
en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l’oiseau
Faire ensuite le portrait de l’arbre
en choisissant la plus belle de ses branches
pour l’oiseau
peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
la poussière du soleil
et le bruit des beÌ‚tes de l’herbe dans la chaleur de l’été
et puis attendre que l’oiseau se décide aÌ€ chanter
Si l’oiseau ne chante pas
c’est mauvais signe
signe que le tableau est mauvais
mais s’il chante c’est bon signe
signe que vous pouvez signer
Alors vous arrachez tout doucement
une des plumes de l’oiseau
et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.

Jacques PRÉVERT, Paroles, 1945

Les modèles selon Yves Chaudouët

mercredi 1 avril 2015

Les modèles dans la peinture d’Yves Chaudouët

La série de peintures de portraits peints présentée aÌ€ la Criée rend visible un processus de travail en cours, débuté en 2009 par Yves Chaudouët. Il y questionne le rapport aÌ€ l’autre et en particulier aÌ€ ses modèles, qu’il peint et parfois repeint sur le meÌ‚me tableau, laissant visible les traces du temps et des couches passés.

La question du modèle est abordée à différentes reprises dans son dernier ouvrage, Essai la peinture (Actes Sud, 2015) :

« Je chercherais plutôt à retenir le poème de ces présences, pour pouvoir apprendre de lui, aussi son souffle, et pouvoir le remonter à contresens, le réciter de mémoire » (p.89)

« Comme chaque fois, je médite un instant sur le spectacle de l’autre posant, spectacle inouï qui, d’abord, me paralyse. »
(p.106)

« Ma peinture a besoin de ça, ici : l’espace et le temps de vous posant. Ni photo… ni psychologie d’ailleurs. (Un temps.) Je vous regarde comme je regarderais une pomme, sinon le tableau serait encore plus raté. » (p.113)

Les modèles dans le film en 3D

Dans son film en 3D Le modèle et les éléments, Yves Chaudouët aborde ses modèles au sens de Robert Bresson (1901-1999) qui aborda le sujet dans ses Notes sur le cinématographe (Paris, Gallimard, 1975, coll. « Blanche ») :

« Il ne serait pas ridicule de dire à tes modèles : je vous invente tels que vous êtes. »
« Modèle. Tu l’éclaires et il t’éclaire. La lumière que tu reçois de lui s’ajoute aÌ€ celle qu’il reçoit de toi. »
« Modèles. Mécanisés extérieurement. Intacts, vierges intérieurement. »


 

Compagnie Morphologie des éléments

mercredi 1 avril 2015

La compagnie Morphologie des Éléments a été fondée en janvier 2006 par Yves Chaudouët qui aime s’entourer d’acteurs, de scénographes, mais aussi de musiciens ou de graphistes. Le nom de la compagnie fait écho au travail de Nicolas Poussin sur les éléments terrestres, véritable source d’inspiration pour Yves Chaudouët.

Avec sa compagnie, l’artiste a adapté ou créé plusieurs pièces de théâtre et performances :

Lettres de Hölderlin à sa mère en collaboration avec Juliette Chemillier et François Chattot en 1994.

Conversation à la montagne, de Paul Celan en 1995.

– Les Sonoguidées, avec Anne de Sterk en 2001. « En sollicitant la participation du public, les deux artistes parviennent, magistralement, aÌ€ l’élaboration d’une forme sonore (mais visuelle tout autant puisqu’on assiste aÌ€ l’action) où drôlerie et poésie se côtoie et où théâtralité et performance se frottent sans véritablement se confondre. »
Jean-Marc Huitorel, Des arts et des territoires », Zéro-deux, Février 2012

Yves Chaudouët a produit des performances avec le soutien de l’Institut Français de Vienne, la Fondation Cartier pour l’art contemporain, le Parc Saint-Léger, le Frac Limousin ou encore le Centre des livres d’artistes.

Son travail théâtral s’axe depuis quelques années vers de nouvelles formes scéniques, comme avec WAWGAWAWD ? adapté de John Cage en 2003. Les Å“uvres d’Yves Chaudouët communiquent souvent avec ses pièces, tout comme l’illustre le projet Dehors en 2008 au Théâtre Dijon Bourgogne, où fut présenté La Conférence concertante. Sur cette pièce Yves Chaudouët écrit : « Il s’agit d’un plasticien, qui, s’il refuse de parler de son travail, ne refuse pas pour autant de se preÌ‚ter aÌ€ l’exercice. Il écrit donc une conférence pour quatre comédiens, qui racontent, qui racontent comment ça se passe la création, aÌ€ l’intérieur, comment des pièces deviennent des documents » (Yves Chaudouët, Les dehors d’Yves Chaudet, Caroline Petit-Château, Poly Mars 2008)

Pour en savoir plus sur la compagnie Morphologie des éléments :

Yves Chaudouët

Morphologie des éléments

Interview Yves Chaudouët France Culture

Revue de Presse Morphologie des éléments

La Conférence concertante

 

Histoires de Portraits

mercredi 1 avril 2015

Définition de Portrait :

De l’ancien français portraire, dessiner.
Représentation de quelqu’un par le dessin, la peinture, la photographie, ou autres.
« Au sens général, représentation d’une personne ; mais la définition du portrait comme concept esthétique appelle quelques précisions » (Etienne Souriau, philosophe et esthéticien français du XXème siècle)

Le portrait peut eÌ‚tre une émanation du caractère, de la personnalité de l’individu (expressions, jeux de regards, pose, physionomie). Certains écarts face aÌ€ la réalité peuvent reveÌ‚tir une valeur expressive, c’est le cas par exemple de la caricature. Le portrait véhicule certains codes sociaux et historiques, il est une interface pour communiquer et se présenter. Il peut aussi eÌ‚tre un dépassement de la représentation réaliste vers une expression plus imagée, décalée, symbolique ou abstraite.

Le portrait reveÌ‚t plusieurs fonctions : perpétuer le souvenir d’une personne, créer une image historique, politique, sociale. Il peut eÌ‚tre un symbole de pouvoir en exprimant le prestige de son commanditaire.

Le portrait est en un genre à part entière, au même titre que la nature-morte, la peinture d’histoire ou le paysage. Il s’incarne dans les arts visuels aussi bien en deux dimensions (peinture, photographie, dessin) qu’en 3 dimensions (vidéo 3D, sculpture), mais aussi dans d’autres champs artistiques (par exemple, en littérature).

 

Histoire du portrait :

Icônes antiques et du présent :

La naissance du portrait remonte aÌ€ l’Antiquité, au II siècle et III siècle.
L’intéreÌ‚t premier du portrait est de reproduire les effigies des anceÌ‚tres, des hommes politiques ou des divinités et ainsi de leur rendre hommage. Dans la civilisation romaine, le portrait est symbole de prospérité pour les grands dirigeants. Il s’agit d’affirmer son pouvoir aÌ€ travers des représentations. En Égypte, les portraits du Fayoum ont vocation aÌ€ représenter et ainsi conserver la mémoire du défunt.

Dans les premières heures de la Chrétienté, les portraits dépeignent les figures de la Bible. Les icônes apparaissant peintes sur des retables ou des panneaux de bois mobiles. Les sujets peints n’expriment pas d’émotion particulière, ils ne cherchent pas aÌ€ transmettre des sentiments. Ces icônes ont avant tout un sens théologique, elles font l’objet de l’adoration des fidèles. Elles sont peintes de telle manière que la lumière semble venir de deux sources distinctes, celle qui éclaire le sujet de l’extérieur et celle qui émane de l’intérieur meÌ‚me du sujet. Le sujet a le visage entièrement découvert. Le regard est intérieur, il ne fixe rien en particulier autour de lui. L’icône fait abstraction des notions de perspective, de temps et d’espace.

Les peintures d’Yves Chaudouët, peintes sur des panneaux en bois de 40 x 40 cm renvoient aÌ€ ces icônes. L’artiste aborde ses modèles de face ou de trois-quart, en effaçant les détails jugés iconographiques et en proposant un fond dépouillé. Il peint les visages en cherchant aÌ€ « leur rendre leurs propres traits ». Il y a laÌ€ une volonté de redonner aÌ€ ces visages des propriétés de formes et de volumes aÌ€ travers le regard de l’autre. Il offre alors aÌ€ ces portraits une dimension iconique, celle du présent.

« Il faut peindre cette personne qui accepte d’eÌ‚tre présente, avec ses volumes qui viennent vers vous et s’en éloignent, avec sa manière unique d’eÌ‚tre en couleur avec la lumière, sa présence comme si elle était juste laÌ€. »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 88

 

Les portraits de la Renaissance :

Du Moyen-Âge aÌ€ la Renaissance, le portrait s’ancre dans la culture occidentale. Son apogée se fait au XV° siècle avec les flamands (Jan Van Eyck), les vénitiens, et les florentins.

Après s’est orienté vers la représentation de figures bibliques, le portrait devient un objet de reconnaissance sociale de la Noblesse, puis de la bourgeoisie.

Dans Essai la peinture, Yves Chaudouët évoque les portraits qui l’on inspiré et en particulier ceux de Raphaël (1483-1520) et de Jacopo da Pontormo (1494-1557)

« Ainsi les paupières de Guidobaldo de Montefeltro, les narines d’Elisabetta Gonzaga, la peau de Francesco Maria della Rovere … dans les détails toujours davantage … écrits chacun par le meÌ‚me Raphaël dans une langue vivante inconnue que pourtant nous comprenons, une parole silencieuse, audible sans effort grâce aÌ€ sa puissance visible, une attention, qui déjaÌ€ sans limites (…), est capable de se dépasser encore en créant un langage particulier pour présenter chaque modèle. »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 68

« Le portrait de Maria Salviati par Jacopo da Pontormo me fait l’effet d’un point d’exclamation mis laÌ€ pour la conclure »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 68

Raphaël est considéré par ses contemporains comme le peintre de l’harmonie et de la grâce. Son Å“uvre regroupe l’expression du classicisme dans la Haute Renaissance. Sa technique met en avant une précision du trait, des teintes ainsi que des perspectives.

Jacopo de Pontormo, inspiré par les peintres Dürer et Michel-Ange, est considéré comme appartenant au mouvement maniériste. Ses modèles adoptent plutôt des poses contorsionnées avec des visages inquiets.

 

Au XVIIe et XVIIe siècles :

Au XVIIe siècle, le portrait est progressivement délaissé au profit des scènes de cour et de la peinture d’histoire.

Les portraits peints d’Yves Chaudouët nous renvoient également aux peintures de Nicolas Poussin – aÌ€ ses théâtres d’objets – et aÌ€ Francisco de Goya qui disait que dans la peinture, « il n’y a ni dessin, ni couleur, il n’y a que des plans qui avancent et qui reculent ».

Nicolas Poussin est un peintre français (1594-1665) qui porte le classicisme aÌ€ son apogée. Cherchant aÌ€ atteindre l’idéal de la perfection antique, inspiration très présente au XVIIe s, il peint en particulier des paysages en construisant les scènes par plan, aÌ€ partir de reconstitution miniature.

Francisco de Goya est un peintre et graveur espagnol (1746-1828). De son vivant, il fût essentiellement reconnu comme graveur. C’est aÌ€ partir de 1900 que son talent de portraitiste est apprécié. Son travail inspire le Romantisme et la peinture contemporaine.

//

« Portraiturer aÌ€ la peinture aÌ€ l’huile m’est une entreprise longue et fastidieuse. Les premiers moments du tableau laissent croire que ce ne sera pas si difficile. Mais l’efficacité séduisante des premières intuitions-au rythme enjoué de la découverte du modèle, couleurs fraiÌ‚ches jetées sur la lumière du fond- se change dès la deuxième séance en parois abruptes, en tout opposées aÌ€ ma progression. »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 87

 » Peindre des portraits me renvoie surtout très directement aÌ€ la difficulté d’atteindre la peinture elle-meÌ‚me, transpercée par la photographie, le cinématographe, le rétinien et le commentaire, m’approcher de sa folle simplicité, qui conduit toujours vers plus de surprises … »
Yves Chaudouët, Essai la peinture, Actes Sud, 2015, p. 89

//

Pour en savoir plus sur le Portrait et les peintures d’Yves Chaudouët :

Dossier pédagogique sur le portrait, BNF

Le portrait : pratiques artistiques en arts visuels

Dossier pédagogique, Le portrait au musée des Beaux-Arts de Tours

Portrait du Fayoum

Essai la peinture, Yves Chaudouët, Actes Sud, 2015

Claire Kueny, « Idoles contemporaines. Les portraits peints d’Yves Chaudouët », nov. 2013